Mgr Bienvenu MANAMIKa Archevêque de Brazzaville
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LA MÉMOIRE BIAYENDA


 
 
 
 

La place des laïcs dans l’Église, selon le Cardinal Émile Biayenda

Les temps sont révolus pour tous les laïcs du monde entier, où on les définissait en caricaturant, comme ceux qui dans l’Église, avaient pour fonction d’écouter assis, à genoux ou debout, à dire « amen » et à faire jouer leur portefeuille pour la quête et le denier du culte. Ni eux-mêmes, ni l’Église ne l’entendent plus ainsi. Citons quelques témoignages pour en préciser le sens, la tâche et les responsabilités.

L’Église par Vatican II, a précisé ses rapports avec le monde « où elle fait route avec toute l’humanité et partage le sort terrestre du monde ; elle est comme le ferment et pour ainsi dire, l’âme de la société humaine de Dieu ». (Gaud. Et Spec. IV, n°40). Elle a précisé aux laïcs ce qu’ils étaient : « Citoyens de l’une et l’autre cité, qui doivent remplir avec zèle et fidélité leurs tâches terrestres... » .(Gaud. Et Spes. IV, n°43) ; ce qu’ils devaient faire : « Participer à la mission de l’Église... Les laïcs rendus participants de la charge sacerdotale, prophétique et royale du Christ, assument dans l’Église et dans le monde, leur part dans ce qui est la mission du peuple.de Dieu tout entier ».

Ils exercent concrètement leur apostolat en se dépensant à l’évangélisation et à la sanctification des hommes ; il en est de même, quand, ils s’efforcent de faire pénétrer dans l’ordre temporel, l’esprit évangélique et travaillent à « son progrès, de telle manière que, en ce domaine, leur action rende clairement témoignage au Christ et serve au salut des hommes. Le propre de l’état des laïcs étant de mener leur vie au milieu du monde et des affaires profanes, ils sont appelés par Dieu à exercer leur apostolat dans le monde à la manière d’un ferment, grâce à la vigueur de leur esprit chrétien ». (Cf ; décret sur l’apostolat, 1,2) :

A cette déclaration du Concile Vatican II, il est à propos d’insérer ici une espèce de commentaire, qui se veut en même temps une approbation des Étudiants africains catholiques, réunis en congrès à Besançon à Pâques 1965 : « Les nouvelles orientations offertes par Vatican II et tous les travaux qui l’avaient préparé, grâce à un effort de retour aux sources, permettent seuls de redonner au laïc, sa part de responsabilité longtemps ignorée. Dans l’optique de Vatican II, le laïc n’est plus la classe prolétaire dans la société des chrétiens, mais une partie intégrante du peuple de Dieu, selon la plus authentique tradition évangélique, apostolique et patristique.

Le laïc est un citoyen à part entière dans l’Église, membre du corps mystique du Christ et, à ce titre, pleinement responsable de toute la communauté des chrétiens ».(Cf. « Tam-tam » Revue des Étudiants Catholiques Africains. Juillet 1965, p.20). Pour traiter à fond et objectivement ce sujet, nous allons nous inspirer de principales lignes de ce congrès, dont l’unique thème fut le laïcat africain dans l’Église et le monde d’aujourd’hui. La réflexion après la définition du laïc a porté sur les modalités de formation du laïcat africain, ensuite ses responsabilités dans l’Église et enfin, sur son rôle et ses responsabilités dans le monde.

L’importance des « Églises particulières », soulignée par le Concile incite les congressistes à concevoir et à réaliser le type de laïcat africain, susceptible de témoigner en profondeur de Jésus-Christ :

Créer un nouveau type de laïc, susciter un instinct typiquement africain, défini et concrétisé d’après les problèmes spécifiques de l’Afrique et l’esprit qui guide le chrétien africain, qui leur cherche une solution chrétienne. Leur définir le Christ qui est aussi définir le laïc africain.

Chercher les aspects de la personnalité du Christ qui intéressent le laïc face à l’Afrique :

Le Christ serviteur qui a libéré l’homme de la grande misère, la séparation d’avec Dieu, le péché. Le laïc africain doit être un serviteur de l’Afrique.

Le Christ et la charité qui exigent l’ouverture à tous les hommes, jusqu’aux ennemis, la bannissement du favoritisme tribal et l’ouverture du sens de la famille à l’échelle nationale et humaine.

Le Christ et l’homme, il n’a vécu que pour l’homme, de l’incarnation à sa résurrection, attitude qui révèle au laïc un sens humanitaire aigu et du respect de l’homme partout : attente devant les guichets, les pourboires, vexations de toutes sortes à bannir.

Le Christ et le monde : il récapitule tout le cosmos. L’œuvre du chrétien fait partie du monde sauvé, sanctifié et que le Christ offre à son Père. En organisant le monde, il aménage un cadre confortable, une cité terrestre aussi habitable que possible à l’homme, et ainsi il créera une œuvre d’être présentée à Dieu le Père. L’attention se porte ensuite sur les méthodes de formation du laïcat, qui doivent être adaptées à la personnalité africaine et conçues en fonction des problèmes qui se posent à sa conscience de chrétien, dans le milieu où il est appelé à témoigner le Christ. Pour ce faire, un examen minutieux est fait des situations traditionnelles où le sacré est la base des explications et des interprétations des phénomènes, où le sentiment religieux accompagne toutes les activités de l’individu, où l’éducation saisit l’individu dans une communauté entière et d’une façon fonctionnelle.

Nous avons d’ailleurs déjà parlé de tous ces phénomènes. La colonisation, le christianisme, l’urbanisation ont transformé la physionomie de l’Afrique. Un nouveau type de société est apparu avec des situations nouvelles. Un retour en arrière est impossible. Les méthodes de formation doivent être en fonction de ce que sont et seront demain les intellectuels africains et militants chrétiens. La tâche est énorme et c’est à toute l’Église d’Afrique qu’elle doit être menée : afin d’exprimer sa foi à travers ses propres expressions. Après avoir cité des mouvements d’adultes, telle l’œuvre des catéchistes ou d’enfance, comme les Cœurs Vaillants, ou les Scouts, que les Missionnaires ont institués en Afrique, on constate l’échec souvent dû au manque de soutien du militant par le clergé ou par défaut, de méthodes adaptées au milieu africain. La conclusion conduit à trois exigences fondamentales :

Exigence enfin d’une vie de foi profonde alimentée par la fréquence des sacrements...

Émile Cardinal Biayenda,
L’Évêque dans l’Église
Pp.57-60

 


 
 
 
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